Le vent s'est bien calmé durant la soirée. Un ronronnement qui ressemblait bien au bruit d'un moteur se faisait entendre par intermittence. Le plus agaçant était de ne pas parvenir à l'identifier. Dès que nous quittions la cabine pour écouter sur le pont, le ronronnement disparaissait. A l'intérieur, ça ronronnait en sourdine partout et aucun appareil électrique n'était allumé.... Mille millions de milles sabords!! Il vient d'où ce bruit.!! Damien résoudra l'énigme le lendemain. De jour, c'est mieux. Un navire de guerre se trouve dans la baie et utilise ses générateurs. Le bourdonnement nous arrivait surtout par l' eau... Les militaires surveillent l'arrivée du pétrole russe échangé en pleine mer sur des pétroliers grecs peu scrupuleux mais bien sûr en dehors des eaux territoriales. Damien a fait un copié collé d'un article de France info sur le sujet, à lire à la suite et illustré dans les photos par une impression d'écran du radar de positionnement de ces navires.


Nouvelle randonnée ce matin , je pars plus au sud, au village de Poulithra, à 4kms. La route est large, sinueuse et borde la mer, ce qui la rend attrayante, sans cela, elle serait ennuyeuse. Peu passante car en matière de route de bord de mer, c'est un cul de sac. 50% des véhicules passants sont des camping-car. Le village est encaissé, s'étire en longueur sur 2 kms, en montée. Par la rue principale, je le traverse puis reviens vers la mer en le contournant, par un petit sentier en terre très sympa. Le nombre d'hôtels et chambre d'hôtes confirme la présence des touristes l'été. Pourtant, je ne trouve pas beaucoup de charme à Poulithra, pas de place de village, des rues bordées de villas espacées, plage de gros galets. Mais c'est sans doute un bon point de départ pour les randonnées.


J'avais remarqué sur la route de l'aller des caroubiers. J'ai appris l'existence de cet arbre, ainsi que ses propriétés, à l'automne dernier seulement, lors d'une rando avec Fabienne, qui m'avait alors fait part de ses connaissances. Le caroubier produit des gousses, telles le petit pois, d'où on peut extraire la graine de caroube. Les gousses doivent être cueillies à maturité ( 8 à 9 mois),elles sèchent et prennent une couleur marron. Je n'ai jamais goûté, mais il semble que le goût soit plutôt sucré et aromatisé, approchant celui du chocolat au lait. Ses nombreuses propriétés en font un complément alimentaire non négligeable. C'est ainsi que de quelques arbres le long de la route, j'ai pu voir des champs de caroubiers.


J'ai oublié hier de vous parler de la fête des lanternes à Leonidio. Lors de la pâque orthodoxe (fête religieuse la plus importante en Grèce), le soir du samedi saint, il y a un lacher de grosses lanternes (1,50 m de hauteur environ), pour la plupart confectionnées par les enfants à l'aide de canne (l'equivalent de l'envahissant cardon chez nous) et de papier. Plus d'une centaine de lanternes multicolores s'élèvent dans le ciel, tel des montgolfières dans le ciel, gonflées d'air chauffé par la combustion de chiffons imbibés d'huile et pétrole.


En début d'après-midi, en vu du coup de vent du nord annoncé dans la soirée, nous avons déplacé le bateau pour se mettre en longside. Le bateau est ainsi face au vent et nous n'aurons pas à nous inquiéter de l'ancre demain matin, au moment de partir.

Demain cap sur Gerakas un petit fjord à 35 NM au sud .





Embargo : la nouvelle route du pétrole russe pourcontourner les sanctions


Le 5 décembre dernier, l'Union européenne a banni toute importation de pétrole brut russe par la mer. Des centaines de millions de barils que Moscou continue pourtant d’exporter aujourd’hui par d’autres routes. L’une d’entre elles passe par la Grèce, et l’Inde avant, parfois, de revenir en Europe. Sous les radars. 


La baie de Lakonikos, c’est la Grèce des cartes postales. Un petit paradis à la quiétude récemment troublée. Quand il part en mer, Georges Drakoulogonas aperçoit d’imposants navires qu’il n’avait pas l’habitude de croiser dans ces eaux. Des supertankers. “Depuis six mois, il y a vraiment beaucoup de bateaux, indique le marin. Les tankers arrivent. Et il y a des échanges de pétrole d’un navire à l’autre. Avant, tout ça se déroulait au port de Rotterdam, par exemple, mais quand l’embargo a été mis en place à cause de la guerre en Ukraine, ils sont venus ici.”  Selon le marin et comme le montrent des photos que nous nous sommes procurés, des transferts de milliers de barils de pétrole, tankers coque-contre-coque, ont lieu quotidiennement dans les environs. Ce jour-là, nous assistons à l’un de ces échanges. A quelques centaines de mètres de notre bateau, deux tankers naviguent côte-à-côte. Au premier plan, l’Ottoman Integrity, un navire turc, capable d’emporter dans ses soutes plus d’un million de barils de pétrole brut. Grâce aux données maritimes, nous avons remonté son sillage. Avant d’atteindre la Grèce, le tanker est passé par le détroit du Bosphore, le 30 mars. Neuf jours plus tôt, le 21, il est parti de Port Taman. Un important terminal pétrolier russe situé sur la mer noire.


16,1 millions de barils transférés entre tankers en deux mois


Depuis l’embargo, la baie de Lakonikos et ses eaux calmes sont devenues un lieu d’échange privilégié pour le pétrole russe. Selon les données de l’agence de presse financière Bloomberg, 16,1 millions de barils russes auraient transité dans le golfe grec ces deux derniers mois. Valeur totale estimée : un milliard d’euros. Contacté, le ministère de la marine grecque affirme ne pas pouvoir agir. “Les transferts de cargaisons entre pétroliers sont autorisés dans les eaux internationales, c'est-à-dire à une distance supérieure de six milles nautiques des côtes, précisent les autorités grecques. Les mouvements des navires impliqués sont sous surveillance” Une position que peinent à comprendre certains habitants. « Je pense que ce n’est qu’une question de temps avant qu’il n’y ait une catastrophe, s’inquiète Thalis Ladadakos, agriculteur et militant écologiste dans la région. Moi, ce que je ne comprends pas, c’est comment la loi peut permettre de faire ce que tu veux dans les eaux internationales. C’est ce qu’il se passe là-bas.» Un point d’escale, en pleine mer, voilà ce qu’est aujourd’hui la baie de Lakonikos, la première étape d’une nouvelle route qui permettrait de contourner l’embargo européen. Après les transbordements au large de la Grèce, certains des navires accostent en Chine, mais surtout en Inde. En un an, New Delhi a multiplié par 22 ses achats de pétrole russe. En inde, le brut de Moscou est raffiné et s’achète une virginité. Un courtier spécialisé en transport maritime raconte : “Lorsqu’il est raffiné en Inde, vous ne pouvez plus prouver que le pétrole est russe. Comment voulez-vous le prouver? Le produit devient indien et peut être livré n’importe où.” Une partie de ce pétrole reviendrait alors en Europe. D’après le ministère de l’économie indien, les exportations de pétrole raffiné vers notre continent ont progressé de 20 % depuis le début de la guerre.


Les armateurs grecs sont des chauffeurs de camionnettes de la mer qui transportent n’importe quoi, n’importe où, pour n’importe qui


Mais alors, à qui appartiennent les navires qui aident la Russie à contourner les sanctions occidentales ? Sur les cartes radars, apparaissent les tankers et leurs pavillons : Panama, Liberia mais aussi la Grèce. Récemment, l’Ukraine a épinglé 5 compagnies grecques qui transportent du pétrole russe. A Athènes, de nombreux armateurs n’ont pas répondu à nos sollicitations. Seul Nicos Vernicos, armateur et président émérite de la chambre de commerce internationale d’Athènes, accepté de nous rencontrer. Lui assume ces transferts de pétrole russe vers l’Inde et la Chine. "C’est une bonne affaire car, en ce moment, les prix de transport augmentent. Les armateurs grecs sont des chauffeurs de camionnettes de la mer qui transportent n’importe quoi, n’importe où, pour n’importe qui". Contactée, la Commission européenne assure que l’embargo instauré porte ses fruits mais elle indique ne pas pouvoir intervenir lorsque le pétrole russe est raffiné dans un pays tiers avant de revenir en Europe.

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